Elles font bouger Le Havre
Culture

Ilka Kramer, artiste invitée à exposer à la Maison du Patrimoine

Inspirée par Le Havre autant qu’elle est préoccupée par le dérèglement de la planète, Ilka Kramer présente une exposition qui interpelle sur la perception de la ville reconstruite par Auguste Perret.

Publié le 30/09/2022

  • lehavre.fr : Vous êtes originaire d’Allemagne. Pouvez-vous revenir sur votre parcours d’artiste ?

Ilka Kramer : J’ai d’abord fait des études de photographie à Dortmund puis ai travaillé pendant dix ans comme photographe de mode avant de déménager vers le Sud de la France avec mon mari, qui est Français, où j’ai également photographié pour de la publicité, des architectes, domaines viticoles, etc. Mon activité artistique s’est développée à partir du moment où nos enfants avaient grandi et que j’avais plus de disponibilité mentale.

  • lehavre.fr : Comment s’est orientée votre pratique ?

I.K. : Concernée par l’écologie, j’ai dès le départ travaillé en lien avec la nature, et sur le rapport que l’Homme entretient avec elle et l’espace, puisque j’adore aussi l’architecture. Très vite, j’ai exposé. Comme j’organise également un festival de courts-métrages dans la vallée de la Drôme, j’ai eu l’occasion de rencontrer le réalisateur havrais Matthieu Simon qui, apprenant mon amour de l’architecture, m’a invitée à découvrir celle du Havre. J’ai immédiatement adoré !

  • lehavre.fr : Comment expliquez-vous cette attirance ?

I.K. : Les espaces sont généreux, on respire et on se sent à l’aise dans ces grandes rues du centre reconstruit. J’aime aussi l’aspect répétitif de Perret, une architecture qu’en tant que photographe ou graphiste il est très facile de s’approprier, offrant une grande liberté artistique. On peut aisément aller vers de l’abstrait rien qu’en photographiant ces bâtiments rectilignes. Bien entendu, en tant qu’Allemande, je suis également sensible à l’histoire dramatique du Havre.

  • lehavre.fr : Cette dimension habite-t-elle aussi votre travail sur Le Havre ?

I.K. : Oui, car il s’agit pour moi de savoir comment cette ville reconstruite peut faire face à une nouvelle catastrophe, celle du changement climatique. Je vois ici l’usage que l’on peut faire des espaces publics libérés des voitures, des toits terrasses à végétaliser et où récupérer l’eau, des cours intérieures qui pourraient se transformer en permacultures ou basses-cours. Dans l’exposition havraise, produite grâce au soutien de la Maison de l’Architecture de Normandie, je compose des mises en scène à partir de mes photographies, que je retravaille en maquettes et que je rephotographie pour créer des perspectives et des jeux d’échelle qui interrogent.

  • lehavre.fr : C’est bien là votre objectif, non ?

I.K. : Je souhaite, d’une part, que le visiteur sente que quelque chose cloche dans cet environnement qu’il reconnaît immédiatement comme étant Le Havre. Cette façon de déplacer le regard me plaît. D’autre part, on ne peut que s’interroger sur le futur de cette ville et de notre monde. J’ai, d’une certaine façon, l’impression d’imaginer l’avenir en donnant des pistes à partir de photographies qui restent néanmoins irréelles ou poétiques.

  • lehavre.fr : Et la nature ?

I.K. : Elle est présente partout, que ce soit par des animaux naturalisés prêtés par le Muséum d’histoire naturelle et que j’ai utilisés comme sujets, ou par de la végétation qui contraste avec les espaces urbains minéraux. Le végétal sublime l’architecture et ouvre des pistes de réflexion pour l’observateur.

  • lehavre.fr : Pensez-vous être à votre tour une source d’inspiration ?

I.K. : J’ai des idées bien précises mais mon champ reste celui de l’art. J’observe qu’il se passe des choses très intéressantes au Havre pour réinventer la ville de demain, comme la rénovation du quai de Southampton qui est une grande réussite.

Plus d'infos sur l'exposition

Présentée du 15 octobre 2022 au 29 janvier 2023, l'exposition « L’herbe folle, l’angle droit, l’horizon et la girafe – L’espace du vivant dans Le Havre de Perret » s'inscrit dans le cadre de la programmation Regard sur le patrimoine en béton, proposée par le Pays d’Art et d’Histoire Le Havre Seine Métropole.

L'exposition est accessible gratuitement à la Maison du Patrimoine, 181 rue de Paris, tous les jours de 10h à 12h30 et de 14h à 18h.

Plusieurs temps forts sont également proposés autour de cette exposition dans le cadre de Zigzag, festival d'architecture et des arts de l'espace :

  • Samedi 15 octobre à 15h : visite guidée de l’exposition par l’artiste (45 min - gratuit)
  • Samedi 15 octobre à 16h : présentation et signature du catalogue d’exposition
  • Dimanche 16 octobre de 10h à 12h et de 13h30 à 16h : atelier - balade photographique avec l’artiste (gratuit)

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